« N’en parler jamais, y penser toujours »

« N’en parler jamais, y penser toujours ». Voilà ce que semble être devenu le mot d’ordre des Français concernant l’immigration. La question, lancinante, peut surgir à tout moment, au cœur de la crise des gilets jaunes, au détour du Grand Débat National… Mais, à chaque fois, on s’efforce de la renvoyer sous le tapis, une fausse pudeur qui cache un profond malaise.

Cela se comprend : comment parler d’immigration quand ce sujet semble avoir été préempté depuis des années par le Front National ? Mais vouloir faire croire qu’un sujet appartient à tel ou tel parti politique, c’est ce contre quoi LaREM a été fondé. Nous n’avons pas vocation à nous attaquer à une thématique parce qu’elle paraitrait trop subversive, ni d’ailleurs parce qu’elle paraitrait très alléchante. Nous nous intéressons aux problèmes de la France et des Français : l’immigration en est un, au même titre mais dans une moindre mesure que l’écologie ou le pouvoir d’achat.

Tout cela est parti des déclarations du Président de la République devant les députés de la majorité. Il faut d’ailleurs noter qu’Emmanuel Macron s’est exprimé sur de nombreux sujets ; les médias en ont retenu un seul, libre à eux mais c’est probablement que le sujet les intéresse, on ne peut pas ensuite nous accuser de nous en emparer. Si gouverner consiste à ne s’occuper que des problèmes qui n’intéressent pas les Français, nous n’avons pas la même définition de la politique.

Les 30 septembre et 2 octobre prochains, aura lieu un débat parlementaire sur l’immigration. Il est représentatif de l’acte II du quinquennat : le dialogue. Entre les Français et l’exécutif, comme c’est actuellement le cas pour l’écologie avec la convention citoyenne sur le climat, comme cela sera le cas pour les retraites. Ce dialogue doit aussi avoir lieu entre l’exécutif et le législatif. L’opposition nous dit souvent avoir des solutions, écoutons-les ! La gauche dit qu’il n’y a aucun problème mais ce n’est pas ce qui ressort des sondages qui peuvent être effectués (ainsi le sondage Ipsos pour la Fondation Jean Jaurès paru lundi : l’impression « qu’on ne se sent plus chez soi comme avant » est approuvée par 64 % des sondés, soit une hausse de 4 points depuis 2017) ; la droite dit que la seule solution est sécuritaire mais c’est caricaturer une situation difficile où d’une part la France a besoin de main d’œuvre et d’autre part la France doit répondre à des crises climatiques et politiques d’une extrême violence.

J’ai eu l’occasion d’en parler sur Radio Classique ce matin : sur un sujet aussi important, il faut éviter les caricatures et d’hystériser le débat. Nous savons que l’immigration est instrumentalisée par ceux qui veulent accentuer le sentiment de rejet lié à l’étranger et à l’islam, commençons par les écarter.  Nous avons voté, à l’automne 2017, une loi « Asile et immigration », commençons par l’évaluer. Nous connaissons la proposition qui est faite par certains membres de la majorité pour imposer à l’avenir des quotas. Hors du droit d’asile, qui est sacré, ces quotas peuvent être une bonne solution notamment face à l’afflux improbable d’une immigration venue d’Albanie ou de Géorgie. Débattons-en avant de les repousser !

Il ne faut pas avoir peur de parler, sinon on finit par avoir peur de penser. Je suis persuadée que la délibération et le débat sont les ingrédients essentiels de notre démocratie : dans l’hémicycle comme au sein de la majorité, nous devons être capables de nous parler. Le débat permet de se forger une opinion mais surtout d’améliorer une proposition. C’est pourquoi j’attends avec impatience ce rendez-vous parlementaire.

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