Pas assez méchante la majorité ? C’est le constat fait par le Premier ministre, qui entend répondre avec plus d’agressivité au feu nourri de l’opposition, en envoyant quelques parlementaires bien choisis au front.
« Le BA-ba de la politique, c’est aussi la bagarre. Il faut défendre ce que l’on fait », assène-t-on à Matignon dans une tonalité guerrière qu’on a rarement l’habitude d’entendre. Mardi 20 mars, Édouard Philippe est allé défendre lui-même cet adage sur les ondes de RMC-BFMTV, deux jours après les résultats décevants de la République en marche aux législatives partielles.
Un Premier ministre en chef de guerre, donc, alors que s’ouvre un printemps social agité pour le gouvernement -grogne des fonctionnaires, des cheminots, des retraités, 80 km/h, etc.-, sans parler de l’opposition qui pilonne la majorité matin, midi et soir dans les médias.
« Wauquiez n’est peut-être pas crédible quand il nous oppose à la France rurale et quand il prétend qu’Emmanuel Macron aurait un fonctionnement totalitaire. Il n’empêche qu’à force de taper comme un sourd, il en reste quelque chose dans l’opinion », marmonne un député LREM, agacé par la faiblesse de la riposte dans son camp. « Wauquiez, on ne l’a peut-être pas assez pris au sérieux », concède une autre parlementaire.
Depuis quelques jours, l’examen de conscience est en cours au plus haut sommet de l’État. « On n’a pas forcément pris la juste mesure de la colère qui montait », admet le collaborateur d’un ministre, qui reproche à sa majorité de parler souvent « un langage trop technique, et pas assez politique ».
Un gouvernement de techniciens… qu’assume paradoxalement Matignon : « Est-ce qu’on gagnerait à avoir des ministres très politiques ? J’en doute, décrypte un proche d’Édouard Philippe. Si on avait des Jean-François Copé dans la nouvelle génération, les journalistes seraient peut-être contents, mais on perdrait immédiatement des points dans l’opinion. » Et de trancher : « Le style de ce gouvernement, c’est d’avoir des experts dans leurs domaines, comme un médecin à la Santé (Buzyn), un enseignant à l’Éducation nationale (Blanquer), ou une magistrate à la Justice (Belloubet). Si demain ils se mettaient à défendre tous les sujets, ils perdraient une partie de ce qui fait leur force. »
Des parlementaires « trop fébriles » Des experts plutôt que des snipers… La logique trouve toutefois ses limites. Car, lorsque le vent se lève, les bateleurs et autres cogneurs se comptent sur les doigts de la main : Gérald Darmanin, Christophe Castaner, Benjamin Griveaux, Bruno Le Maire, Gérard Collomb ou encore Marlène Schiappa… Difficile dans ces conditions de muscler son jeu. « Mais c’est aux parlementaires de monter au charbon ! » renvoie Matignon.
À ce stade, ils ne sont qu’une poignée à assurer le service après-vente dans les médias. Essentiellement des élus franciliens, comme Olivia Grégoire, Amélie de Montchalin, Stanislas Guérini, Hugues Renson ou Gabriel Attal. « Pour le reste, il y a des parlementaires qui sont encore trop fébriles. Qui ont du mal à assumer nos réformes sur le terrain », reconnaît un conseiller gouvernemental.
Édouard Philippe s’est donc mis en tête d’accompagner ces nouveaux venus dans l’arène politique. « On est dans la logique d’aider les parlementaires le plus possible », reconnaît un de ses lieutenants.